CHRONIQUE / REVIEW

CD

 

Le vaste univers du rock progressif couvre un large spectre tant sur le plan musical que géographique. TAUTOLOGIC est un proche voisin de ce dernier aspect puisque le groupe est basé à Chicago. Cependant, sa musique s’éloigne des horizons symphoniques ou métal si populaires dans le genre depuis quelques années. Un premier exemple de cette différence est que la plus longue pièce fait seulement six minutes au compteur et trois pièces sont même sous la barre des quatre minutes. Vous me direz que des artistes comme ZAPPA, SOFT MACHINE des touts débuts ou GENTLE GIANT ont souvent œuvré dans le registre des courtes pièces. Je vous répondrai alors, félicitations, vous venez de cerner certaines des influences évidentes du deuxième disque de ce groupe américain. Ajoutez, notamment, une bonne dose de CANTERBURY, un brin de STEELY DAN, un peu de 10CC et même du YEZDA URFA, notamment au niveau vocal pour cette dernière influence, et vous avez là une bien belle palette de goût et de couleurs pour en arriver à offrir ce «Re : Psychle».

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Ce foisonnement d’influence est aussi vrai pour l’instrumentation où le quatuor de base, guitare, basse, batterie et claviers, s’agrémente de violon et violoncelle et d’une ribambelle de cuivres et de flutes. Il en va de même de nos repères musicaux où on peut déceler un peu de psychédélisme, un peu de jazz, un peu de calypso ou «Afrobeat» (oui, oui et pas si bête dans le contexte), un peu de funk, un peu de musique de chambre, du folk britannique, du rock et du progressif pur jus. L’amalgame tient très bien la route, intrigue l’auditeur et demande à l’amateur de musique en nous d’ouvrir grand ses oreilles et son esprit sous peine de manquer la chance de découvrir une proposition franchement différente du registre habituel. ETHAN SELLERS est le leader incontestable du groupe, il officie derrière les claviers, il joue de la guitare sèche, il est le chanteur et le compositeur de toutes les pièces sauf pour «Coltrane supermarket» qui est offerte par le batteur PAT BUZBY. Deux choristes se joignent à lui sur cette pièce, ce qui m’emmène à souligner le grand soin apporté aux voix en général. SELLERS multiplie souvent les pistes de voix pour créer une plus grande richesse, une profondeur vocale qui se remarque.

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Chaque pièce rescelle des petites touches imaginatives. Ainsi «Loud shoes» mélange le funk avec des orchestrations classissantes, un excellent solo de guitare et une histoire de pauvreté et de friperie. Sur «The admiral», une pièce plutôt calme mais finement orchestrée, vous avez 15 interlocuteurs aussi improbable que Pinochet, le FBI, un extraterrestre, le bloc soviétique et j’en passe, qui offrent un discours un brin déjanté. Ma favorite est «The professor», une pièce intrigante et fascinante tant sur le plan musical qu’au niveau des paroles sur un professeur un peu particulier, c’est le moins que l’on puisse dire. La finale nous gratifie d’une superbe montée dramatique. La suivante, la pièce aux influences caribéennes «On your left», est l’histoire d’un cycliste qui rêve de nettoyer sa piste cyclable à grands coups de cadenas de bicyclette à en faire rougir le gazon. Spécial dites-vous? Le petit rythme dansant prend une toute autre allure. Sur «The whistler», inspiré du folk anglais, il est question d’un vétéran du « Vietnam» musicien de rue. Seule «Osaka garden» qui clôt l’album, une belle balade sur les bienfaits de la nature pour apaiser l’âme et l’esprit, est plus «standard» dans son offre. Il me plaît de souligner que les paroles de cet album allient l’ironie, le commentaire social et un petit brin de folie. Cela vaut la peine de prendre le temps de suivre musique et paroles en même temps. Au final, voici une bonne façon de débuter l’année en découverte.