CHRONIQUE / REVIEW

CD

 

Déjà un quatrième album pour ce trio suisse qui présente une musique qui se veut claire et énergique et qui veut faire évoluer la musique moderne. Définitivement en progression et à l’avant-garde, ‘Rights’ est un album poli, magnifiquement travaillé et très cohérent.  Sur les traces du très bien reçu ‘X’ sorti en 2015, le nouvel album est étonnant. Venant de musiciens éduqués et disciplinés qui sont tout à fait à l’aise en jazz improvisé mais qui se présente aussi en ‘power trio’ classique avec le son électrique et l’énergie du rock mais qui cohabite avec des ouvrages méticuleux répétitifs et quasi-mathématiques d’une grande et simple beauté. En écoutant on obtient de brèves saveurs qui rappellent dans un flash du KING CRIMSON par ci, du VAN DER GRAAF par là et du KRAFTWERK à l’occasion et pourquoi pas aussi du STOCKHAUSEN ou du Stravinsky. Les thèmes débutent simplement et grandissent lentement et sûrement. Le jeu exquis de la basse expressive tantôt délicate tantôt comme une cathédrale font de ‘Schnellmann’ une bassiste inventif, créatif et très intriguant. La magie de la batterie de ‘Meier’ se veut très complémentaire et crée des tapisseries de rythmes allant du très fin au dément. Finalement ‘Toller’ assemble le tout et est un des rares guitaristes qu’on pourrait comparer à ROBERT FRIPP avec ses cadences syncopées et ses cascades mystérieuses et lancinantes.

 

‘Rights’ est un album rigoureux où chaque note compte et qui doit avoir pris des centaines d’heures à construire. On a donc un album purement instrumental dans sa conception. J’ai même lu que dans leur rigueur on a enlevé des pièces qui n’étaient pas encore à point.  De plus on voit clairement que la virtuosité et la précision du jeu des artistes pointent vers une grande expérience tant sur scène qu’en studio.  Non on n’a pas réussi à recréer ‘Dark Side Of The Moon’ mais je crois qu’on s’en est inspiré pour la qualité de la composition et la précision des pièces.  Voici ce que ça donne en détail.  On ouvre avec la pièce qui donne titre et le ton. ‘Rights’ se construit sur un joli motif ‘staccato-arpeggio’ qui évolue tout en force et qui démontre jusqu’où on peut aller avec des motifs simples. On en a pour plus de treize minutes fascinantes ‘trippantes et frippantes’. La pièce suivante ‘Piccadilly Sources’ suit un peu la même logique mais sur une trame plus jazzée mais aussi plus frénétique.  On enchaîne avec un superbe changement avec ‘Praise / Eleven’ un morceau plus lent, évocateur et mystérieux mais qui se métamorphose dans la deuxième partie en un rythme plus martelé et vindicatif. On ferme la marche avec les dix+ minutes de ‘Rounds’ plus expérimental avec un motif saccadé rappelant une chaine de montage dans une usine et un roulement de train.  Mon morceau préféré est définitivement le premier.

 

Donc en résumé un groupe original, expérimenté et qui a un style bien à lui et peu de défaut. C’est quand même un album qui demande une écoute patiente et une ouverture d’esprit et qui risque de déplaire aux amateurs de rock mélodique ou simpliste. Les répétitions constantes et le tempo rapide en font un album un peu bruyant mais le génie est vraiment dans le détail. Si vous aimez les nouvelles frontières c’est définitivement pour vous. Un groupe qui se fait de plus en plus remarquer sur la scène avant-gardiste et qui ne laisse pas indifférent.