CHRONIQUE / REVIEW

CD

 

Contrairement à ce que l’on peut penser, French TV n’est pas un groupe français, mais américain (de Louisville, dans le Kentucky). Le groupe roule sa bosse depuis plus de trente ans, et sa discographie comporte onze albums, dont un live paru en 1997. Le groupe à été fondé par Mike Sary, et semble en être son seul membre permanent.

 

Les amateurs de jazz-fusion, style Return to Forever/Weather Report, trouveront chaussures à leurs pieds avec FRENCH TV. Cependant, outre la structure très classique des arrangements (voire même de rigueur pour ce genre de formation). FRENCH TV s’amuse quand même un peu en injectant des éléments disparates qui diversifient l’ensemble : Frank Zappa (période The Grand Wazoo, Waka Jawaka etc.), du Soft Machine période post-Wyatt, et le sens de l’humour particulier du groupe (les titres de chansons plutôt frivoles, bien que l’album soit entièrement instrumental).

 

Musicalement, cependant, c’est du sérieux.  SARY et ses musiciens sont une formation solide, œuvrant avec brio au sein d’un genre musical qui ne supporterait pas l’amateurisme. Bien au contraire, l’ensemble se débrouille à merveille avec un matériel difficile. Et pour cause, puisque chaque album de FRENCH TV nous offre une formation différente, SARY semble avoir un flair fou à se trouver de nouveaux collaborateurs émérites.

 

« We're Putting On Our Bulldog Faces » (and Hoping Something Good Happens) est une bonne entrée en matière fusion, qui rappelle à certains égards Miles Davis et John McLaughlin. C'est la pièce "guitare" de l'album et l'on sent l'influence de Steve Vai et Joe Satriani. Mais, on n'en reste pas là, et de délicieux contrepoints guitares-percussions attendent l'auditeur dans le détour.  « Friendly Pursuit », plus rock, et plus directe, c'est sans doute la pièce la plus "évidente" de l'album. Si ce n'est une finale où le jazz reprend ses droits. « Rocka-Saggy-Baby-Bubba-Shaggy-Baba-Boo » s'annonce comme une pièce plutôt soft, presque muzak, mais l'apparition de ce qui semble être un orgue Farfisa transforme littéralement le morceau en quelque chose de plus éclaté et plus intéressant. Un ton enjoué s'en dégage, signe que les musiciens s'amusent à errer de style en style avec une bonne humeur certaine, tout en se montrant amplement à la hauteur de leurs ambitions. Sans doute la pièce la plus expérimentale du lot, elle propose un éventail de styles disparates, mais parvient quand même à garder une unité de ton (d'où la présence de l'orgue en tant que fil conducteur). Un tour de force. Sur une ouverture magistrale, solennelle et orientale à souhait, « Gee, I Wish We Had One'a Them Doomsday Machines » continue le collage musical qui semble être la facture principale de l'album.

 

Malheureusement, « Shemp Vs. Classical Economics » tombe dangereusement dans la redite. Malgré ses agréables accents prog venant des meilleures années du genre, c'est peut-être la pièce de trop.

 

Si la facture de « Metronome Crisis » est un peu plus conventionnelle, c'est sans doute pour illustrer l'aisance de FRENCH TV à glisser vers un son plus pop-rock quand il le faut. Cependant, « Metronome Crisis » n'en reste pas là et nous offre un autre collage musical propulsé par une ligne mélodique de base. Encore une fois il faut noter l'aisance et le plaisir que Mike SARY et ses musiciens communiquent à l'ensemble.

 

Pour terminer, FRENCH TV n'innove en rien, et ses influences ne sont parfois que trop évidentes. Cependant c'est un groupe qui maîtrise ses matériaux avec brio et sait quoi en faire, pour ensuite jouer avec et prendre ainsi sa propre identité.